Imprimer

« Ce programme a permis à une nouvelle génération de quelque vingt mille messagers de lutter pour la tolérance et contre l’extrémisme. »

Paris, le 3 juillet 2017

Ce programme unique de concours d’essais sur la Shoah, coorganisé par le Centre Simon Wiesenthal-Europe (CSW), l’association Verbe et Lumière-Vigilance (VLV) et le Russian Holocaust Centre (RHC), a invité à Paris, pour la treizième année consécutive, les cinq lauréats des pays de l’ex-Union soviétique. Ces étudiants viennent y présenter les résultats de leurs recherches, au cours d’une cérémonie qui se tient à l’Unesco.

De la cuvée 2017, deux lauréats sont originaires de Moscou, les trois autres d’Irkoutsk (Sibérie), de Nijni-Novgorod (au bord de la Volga) et de Berlin (une étudiante russe installée aujourd’hui en Allemagne). Ils ont été sélectionnés parmi plus de deux mille candidats.

C’est Qian Tang, directeur général adjoint de l’Unesco à l’Education, qui a ouvert la cérémonie, à laquelle assistaient les délégations de Russie, d’Autriche, d’Allemagne, d’Israël et d’Afrique du Sud. Il a félicité les lauréats pour leur initiative, « non seulement parce qu’ils conservent vivante la mémoire de la Shoah en Russie, mais aussi parce qu’ils incitent l’Unesco à orienter son mandat vers une cause noble ». Caractérisant cet événement annuel comme « emblématique de l’engagement de l’Unesco à soutenir l’enseignement de l’Holocauste », M. Tang a présenté le nouveau Guide de l’enseignement de l’Holocauste de l’Organisation et promis de se joindre au Centre Wiesenthal, à Verbe et Lumière-Vigilance et au Russian Holocaust Centre pour publier les essais des lauréats de ce 13e concours.

Alexei Kovalenko, délégué de la Fédération de Russie, a souligné qu’« il ne faut appliquer aucune période de prescription pour les crimes commis au cours de la Shoah ». Il a ajouté qu’« aux Nations unies, une résolution proposée par la Russie sur l’Holocauste avait recueilli les voix de 55 Etats, mais que 135 Etats membres n’avaient pas voté pour ».

Shimon Samuels, directeur des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal, a protesté contre « la politique des blocs pratiquée par le Comité du patrimoine mondial de l’Unesco à Cracovie : de nouvelles usurpations du patrimoine juif sont à l’ordre du jour de cette réunion… Il faut cependant féliciter M. Tang pour les initiatives prises par l’Unesco sur l’enseignement et la commémoration de la Shoah ».

Enfant rescapée, Evelyne Askolovich a témoigné de sa déportation et de la perte de sa famille : « Des deux cents enfants déportés dans mon convoi, seuls cinq ont survécu… Ma famille, ce sont les amis que je me suis faits à Bergen-Belsen, comme l’aurait dit Simone Veil à propos d’Auschwitz. » Des condoléances ont ensuite été exprimées en mémoire de l’ancienne ministre, militante des droits de l’homme et dirigeante européenne.

Jonathan Arfi, vice-président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), a soutenu que « toute démocratie nécessite une mémoire collective établie dans le dialogue, et non pas dans la compétition… La mémoire de l’un ne peut pas remplacer la mémoire de l’autre… Etre juif en France aujourd’hui, c’est une pièce à deux faces : d’un côté, c’est une communauté de 450 000 personnes, pleine de vitalité ; de l’autre, cette communauté vit sous le joug de la terreur, du négationnisme et de BDS ».

David Père, avocat membre du comité scientifique de l’Association française des victimes du terrorisme (AFVT), a évoqué la déportation de sa famille et s’est interrogé sur le fait que « des milliers d’étudiants russes non juifs sont attirés par la recherche sur la Shoah, et même davantage après l’effondrement de l’Union soviétique... Une telle recherche, qui n’est pas politiquement neutre, n’est pas facile, mais vous avez bien compris que c’est un combat qui en vaut la peine – menez-le pour qu’il ait un impact fort ! »

Ilya Altman, président du Russian Holocaust Centre à Moscou, a présenté les lauréats et fait valoir qu’il a maintenant entre les mains treize volumes d’essais, déposés pour le concours au fur et à mesure des années. Il a ajouté : « Nous n’oublions pas les autres victimes… Sinon, pourquoi des intellectuels, des journalistes et des hommes politiques français viendraient-ils à l’Unesco pour entendre parler d’essais russes, et ce, depuis déjà treize ans ? »

Les lauréats ont ensuite exposé tour à tour un résumé de leurs essais :

- Roman Zhigun (Moscou, Russie), « Cinéastes de la République populaire de Pologne dans la lutte contre l’antisémitisme d’après-guerre »

- Arina Demina (Irkoutsk, Russie), « Le rôle de la Shoah dans la formation des bases fondamentales de la doctrine d’apartheid en Afrique du Sud »

- Irina Makhalova (Moscou, Russie), « La participation des collaborateurs dans la persécution et la destruction de la population juive de Crimée pendant l’occupation nazie (1941-1944) »

- Denis Kolesov (Nijni-Novgorod, Russie), « Principales mesures et problèmes dans l’enseignement de la Shoah en République fédérale d’Allemagne en tant que continuation de la politique de dénazification »

- Alena Epifanova (Berlin, Allemagne), « De l’interdiction des commémorations à une mémoire prudente ? Une analyse de la présentation de la Shoah dans les manuels d’histoire russes, 1990-2016 »

3 July 2017 1
De gauche à droite : Roman Zhigun, Irina Makhalova, Ilya Altman, Arina Demina,
Shimon Samuels, Alena Epifanova et Denis Kolesov.

Shimon Samuels a remercié l’Unesco et Graciela Vaserman-Samuels, conseillère spéciale auprès de la directrice générale, pour la conception de cet événement. Il a félicité Ilya Altman pour « avoir créé, dans toute l’ex-Union soviétique, une nouvelle génération de quelque vingt mille messagers qui luttent pour la tolérance et contre l’extrémisme ».

Richard Odier, président de Verbe et Lumière-Vigilance, a clos les débats en mettant l’accent sur le besoin d’empathie : « Au-delà des chiffres et des analyses, il y a des personnes en chair et en os. » Il a déploré le meurtre antisémite de Sarah Halimi, 66 ans, torturée et défénestrée de son balcon par son voisin djihadiste, qui l’a assassinée aux cris d’« Allahu akbar ! ». « Personne n’a fait attention à cette affaire, supposément à cause des élections… Il y a un lien entre Sarah Halimi et la déportation d’Evelyne Askolovich et de Simone Veil – la haine des Juifs ! »

3 July 2017 2
Qian
Tang, les délégués, l’équipe, des membres de RHC, CSW et VLV, les lauréats et conférenciers invités.

Nous utilisons les cookies pour améliorer votre navigation sur notre site. En validant ce message vous acceptez l’utilisaiton des cookies. Plus d'informations